SEDE VACANTE

(April 27, 1605—May 16, 1605)



Cesar de Ligny (editor),   Les ambassades et negotiations de l' Illustrissime et Reverendissime Cardinal du Perron  derniere edition (Paris: Pierre Lamy 1633), pp.  638-644:

 

Cardinal du Perron to Henri IV, King of France,

on excluding Sauli

(Rome, May 3, 1605)

Sire,

Depuis les dernierés lettres, que nous avons écrites à votre Majesté, il s‘est fait force pratiques pour changer l' estat des affaires et luy donner une autre forme que celle qu’il avoit lors que nous entrasmes au precedent Conclave. Ceux de la ligue, ainsi appelle-t'on les Cardinaux qui se sont associez contre le Cardinal Aldobrandin, à sçauoir Fernese, Montalte, Sforce, Aquaviva, Sfondrat et leurs adherents : ont fait ce qu'ils ont peu, par divers et secrets moyens pour nous persuader, sinon de nous separer d’Aldobrandin, à tout le moins de nous conserver neutres, et demeurer à la fenestre pour eftre spectateurs du succés et nous joindre a l’un ou à l'autre party, selon les ocasions, et que la rencontre des affaires nous presenteroit: nous remettants devant les yeux qu'il y auoit beaucoup plus d’honneur pour nous, si nous entrions au Conclave libres et faisants un party à part: que si nous y entrions liez et joints avec une autre faction, et que par nostre neutralité, nous serions arbirtes des affaires , et donnerions le poids à celuy des partis qu' il nous plairoit, lequel nous seroit beaucoup plus obligé si nous nous joignions à luy, estant en nostre liberté de ne le faire pas que si nous luy adherions, y estants liez et assujettis par une stipulation precedente. Neantmoins, nonobstant toutes ces brigues, nous auons este d’avis, apres plusieurs  consultations agitees de part et d'autre sur ce fait, de demeurer fermes en l' union avec Aldobrandin, et aux mesmes termes, sur lesquels avoit esté fondée la precedente. A quoy outre les raisons que j' avois representées à V.M. devant l’autre Conclave, nous ont conforté:  Premierement, la demonstration que V.M. nous a faitte par ses lettres, d'avoir eu ceste union avec toutes ces circonstances tres-agreable. Secondement, la consideration que le Cardinal Aldobrandin s’estant tres bien porté, pour nostre regard en l’élection du Cardinal de Florence, et n' ayant rien fait depuis, ny avec les Espagnols, ny avec autres, qui prejudiciast à vostre service, comme nous l' avons recogneu, par la suitte des affaires : il nous a semblé ne pouvoir changer envers luy , sans nous rendre sujets à estre accusez d' inconstance et d' ingratitude, et donner mauvais exemple desormais à tout le monde, de se fier en nos considerations. Tiercement, que demeurer neutres cinq entre soiixante-trois, c'estoit chose comme impossible, et de nous attacher avec les autres qui ne sont, ny si forts en nombre qu' Aldobrandin ny unis entre eux, ny dépendants absolument de leur propre volonté, mais de celle du Roy d'Espagne, aux interests duquel ils sacrifieront tousjours tous les nostres : c'est chose mal asseurée. Une seule difficulté nous reste, qui est, qu`il nous a este dit que vostre Majeté desiroit que le Cardinal Sauli fust mis au nombre de ceux qu’elle incluoit, pour le Papat. Or est il que le Cardinal Aldobrandin proteste qu’il le tient pour ennemy de sa personne, et de la memoire du Pape Clement, et s'est declaré ouvertement d’aller à son exclusion. Aux fins dequoy, il nous a priez, les uns apres les autres, de ne le vouloir point r abandonner en cest affaire : adjoutant qu’il ne pouvoit croire que Vostre Majesté qui l’avoit pris en son amitié et en sa protection, voire jusques à luy offrir de passer les monts, s’il en estoit de besoin pour le défendre, luy et les siens; et qui monstroit tant de gratitude envers la memoire du Pape Clement et qui témoignoit luy avoir sçeu gré du service qu'il luy auoit si recentement rendu, en l'électtion du Cardinal de Florence voulust porter au Papat un homme qui fust ennemy iuré de sa personne, et de la memoire, et du nom du Pape Clement, et qui fuft pour destruire les reliques de sa famille. Ains au contraire, qu' il s' asseuroit que si Vostre Majesté eust esté avertie de ces choses, qu’elle n' eust jamais confenty à son inclusion. Et partant, qu'il nous prioit en ce cas de faire ce qu’il estoit asseuré que vostre Majesté feroit, si elle estoit sur les lieux : et principalement sçachant qu’une des principales sources de l' inimitié qui auoit esté entre le Pape Clement et luy, estoit venuë de ce que ledit Cardinal Sauli s'estoit opposé à la benediction de V. M. lors que ses affaires s’estoient traittees à Rome.  Cela SIRE, avec les remonstrances presque tous ceux, qui sont affectionnez icy au seruice de V. M. sur ceste rupture, nous mettent en une extreme peine. Car ils nous representent que ledit Cardinal Sauli a toujours este partisan et pensionnaire des Espagnols. Ils nous disent qu’il a tousjours esté l’oracle, le conseil, et le principal confident de tous les Ambassadeurs d’Espagne. Ils nous alleguent qu'il a voulu exclure V. M. non seulement du Royaume, entant qu'en luy estoit, mais aussi de l’Eglise. Ils nous remonstrent que le Roy d’Espagne tient ses parents liez et obligez d’un milion d’or, de debtes. lls ajoustent qu’il est possedé d'un homme, qui le domine absolument qui à tousjours esté entierement Espagnol. Ils nous remettent, au reste, devant les yeux que le Roy d’Espagne, son Ambassadeur et tous ses Ministres, le desirent et demandent en premier chef, voire jufques à lasser Come, et tous ses autres, derriere : Qu' ils sont les brigues, et vont maudier ouvertement les voix, pour luy : à offrants Duchez, Comtez et Marquisats à diverses personnes, et cent mille escus en particulier au Cavalier Clement, pour gaigner le Cardinal Aldobrandin.  Ils nous rapportent que les Espagnols protestent ne vouloir que luy seul et se vantent et glorifient qu'ils l‘auront assesurément, et recouvriront en ceste élection, l’honneur, qu’ils ont perdu en celle du Cardinal de Florence,  Ils nous prient de  considerer que s'il ne reüssit point, nous perdrons le Cardinal Aldobrandin, et tout son party, en l'offençant, et luy laissant un perpetuel ulcere dans le cœur, d’auoir voulu estre autheurs de sa ruine : Et que s’il reussit, nous le perdons encore beaucoup plus, luy et tous les siens, en le donnant en proye à un homme qui ne cherche qu' à le destruire, et qui en abolissant le party d’Aldobrandin, abolira sans doute tout party de V. M. dedans Rome, qui est principalement, et quasi uniquement soustenu de celuy d' Aldobrandin: Que ceste Élection, outre cela rompt le col à tous les autres sujets que vostre Majesté desire, avant Sauli, lefquels ny en ce Conclave, ny en aucun autre, ne peuvent jamais plus reussir; ayant perdu le party d’Aldobrandin, soit par mécontentement, soit par dissipation : De sorte que la gloire que vostre Majesté commençoit à avoir acquisé à Rome, et par toute l’Italie, voire par toute la Chrestienté, de faire les Papes: qui ·ne pouvoit estre continuée, sinon en faisant quelqu’un, ou exclus, ou non defiré, en premier chef, par les Espagnols; tombe par terre. A cela ils joignent encore, que le party d’ Aldobrandin, ayant esté jusques icy, uny avec vostre Majesté, et vostre Majesté ayant fait profession de cherir la memoire de son oncle, et proteger les reliques de sa Famille, la fortune d’Aldobrandin ne peut estre ruinée, pendant qu’il se porte bien avec V. Majesté, sans offencer l’honneur de V, M·ny sa ruine estre effectuée , sinon par voye et consequences pernicieuses au service de V. M. Car la premiere chose qu’ils disent que Sauli, s'il est Pape, sera pour ruiner Aldobrandin, sera de rompre à l' instance des Espagnols la Bulle du nombre des Cardinaux, afin de contrepeser dans le College l'authorité d’ Aldobrqandin, et de créer uue nouvelle trouppe de Cardinaux, lesquels les faisant ou des ses parents, ou de ses compatriotes, il les fera sans doute esclaves du Roy d'Espagne, et les faisant ennemis d' Aldobrandin, et de la memoire du Pape Clement, il faudra qu’il les face contraires à V. M. qui a jusques icy monstré de vouloir témoigner toute sorte de gratitude à la memoire du Pape Clement. Et la conclusion de la ruine d’Aldobrandin sera que ayant abbatu le chef de ce party, que l’authorité d’ Aldobrandin renoit uny ensemble, contre les Espagnols : les Efpagnols recueillent les pieces du bris de ce naufrage : N' ayant pas la breveté du Papat de Leon XI. donné assez de loisir à vos seruiteurs, d' acheuer d' éclorre et former à part le Party de V.M.  A quoy se peut encore ajouster, que le Cardinal Aldobrandin, qui demande non seulement à toutes ses creatures (dont plusieurs au fait de Sauli, ont este gaignees par les Espagnols) pour unique gratitude et recognoissance, mais à tous ses amis, pour unique grace l’exclusion de Sauli; se voyant abandonné des François, et desesperé, possible de pouvoir par autre voye, exclure Sauli; sera contraint de fe jetter tout à fait, entre les bras des Espagnols, et leur ayder à faire hors cestuy-là un Pape tel qu'il leur plaira,  et où nous n' aurons autre part, que la honte de l' auoir exclus, et ne l’avoir pû empescher : Et cela, non seulement en ce Conclave, mais en tous les subsequents : voila, Sire, les perplexitez esquelles nous nous trouvons sur le fait de conserver l' amitié et protection d' Aldobrandin, ou de favoriser et promovoir l' election de Sauli, le quel ne peut estre Pape, si nous François ne nous joignons en sa personne, avec les Espagnols.  Dieu nous face la grace d' en sortir au contentement de vostre Majesté, et à moy en particulier,

Sire, celle d' estre et demeurer toujours, D. V. M.

Le tres-humble et tres obeyssant sujet et serviteur,

I. Cardinal du Perron.

 

De Rome ce 3. May 1605


link to documents on  papal  election-May, 1605


 



© 05/30/2014


June 5, 2014 3:52 PM

John Paul Adams, CSUN
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